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JEAN-MICHEL GUIEU
Les militants pour la Société des Nations dans la France de la première moitié du XXe siècle
S'inscrivant dans la moyenne durée (de la Belle Epoque au début des années cinquante), cette thèse tente de retracer les efforts entrepris par une élite d'intellectuels et de parlementaires, souvent parmi les plus brillants de leur génération (Léon Bourgeois, Joseph Paul-Boncour, René Cassin, Jean Hennessy, Henry de Jouvenel, Célestin Bouglé, Émile Borel, Georges Scelle, ou encore Théodore Ruyssen), en faveur de l'institution d'un ordre juridique mondial, incarné par la Société des Nations puis l'Organisation des Nations Unies.
A l'opposé des bonnes intentions naïves voire de l'aveuglement coupable généralement associés à leur combat, cette thèse entend montrer l'inventivité des dispositifs et des procédures préconisés par ces hommes dont l'objectif consiste à soumettre les rapports internationaux à un ensemble de règles juridiques propres à limiter, sinon à abolir, le recours à la violence entre les Etats souverains.
Au lendemain de la première guerre mondiale, leurs espoirs se sont incarnés dans la Société des Nations naissante, et c'est pourquoi ils s'en sont faits les apôtres dévoués, même si le nouvel organisme leur est apparu d'emblée fort imparfait. Des structures militantes, aujourd'hui méconnues, furent spécifiquement créées dans le dessein de soutenir la SDN et de propager en France « l'esprit de Genève ». Cette propagande, souvent relayée sur le terrain par des organisations partageant le même idéal, telles les sections locales de la Ligue des droits de l'homme ou certaines associations d'anciens combattants, fut loin d'être négligeable et la mobilisation de l'opinion publique en faveur de la paix par la SdN prit même des proportions tout à fait considérables au tournant des années vingt et trente.
Ces hommes et femmes, proches généralement de la nébuleuse radicale, défendirent toujours une conception réaliste de la paix, éloignée de tout pacifisme sentimental ou de « paix à tout prix », d'où leur attitude généralement patriote, anti-munichoise et sans compromission avec le nouvel ordre européen nazi. Au lendemain de la Seconde guerre mondiale, ils soutinrent logiquement la création de l'ONU, mais ils sont vite déçus par un organisme bientôt paralysé par l'antagonisme des deux Grands.
Cette thèse tente donc, au travers des portraits croisés des principaux militants français pour la SdN, de retracer l'histoire d'un combat méconnu dont les succès et les échecs renvoient à certaines interrogations contemporaines..