Projet de déclaration des Résistances européennes
(1944)
Quelques militants des mouvements de résistance du Danemark, de France, d'Italie, de Norvège, des Pays-Bas, de Pologne, de Tchécoslovaquie et de Yougoslavie, et le représentant d'un groupe de militants antinazis en Allemagne, se sont réunis dans une ville d'Europe les 31 mars, 29 avril, 20 mai, 6 et 7 juillet. Ils ont élaboré le projet de déclaration ci-dessous qu'ils ont soumis à la discussion et à l'approbation de leurs mouvements respectifs et de l'ensemble des mouvements de résistance européens. […]
La résistance à l'oppression nazie qui unit les peuples d'Europe dans un même combat a créé entre eux une solidarité et une communauté de buts et d'intérêts qui prennent toute leur signification et toute leur portée dans le fait que les délégués des mouvements de résistance européens se sont réunis pour rédiger la présente déclaration. […]
Souscrivant aux déclarations essentielles de la Charte de l'Atlantique, ils affirment que la vie des peuples qu'ils représentent doit être fondée sur le respect de la personne, la sécurité, la justice sociale, l'utilisation intégrale des ressources économiques en faveur de la collectivité tout entière et l'épanouissement autonome de la vie nationale.
Ces buts ne peuvent être atteints que si les divers pays du monde acceptent de dépasser le dogme de la souveraineté absolue des États en s'intégrant dans une unique organisation fédérale.
La paix européenne est la clé de voûte de la paix du monde. En effet, dans l'espace d'une seule génération, l'Europe a été l'épicentre de deux conflits mondiaux qui ont eu avant tout pour origine l'existence sur ce continent de trente États souverains. Il importe de remédier à cette anarchie par la création d'une Union fédérale entre les peuples européens.
Seule une Union fédérale permettra la participation du peuple allemand à la vie européenne sans qu'il soit un danger pour les autres peuples.
Seule une Union fédérale permettra de résoudre les problèmes des tracés de frontières dans les zones de population mixte, qui cesseront ainsi d'être l'objet des folles convoitises nationalistes et viendront de simples questions de délimitation territoriale, de pure compétence administrative.
Seule une Union fédérale permettra la sauvegarde des institutions démocratiques de manière à empêcher que les pays n'ayant pas une suffisante maturité politique puissent mettre en péril l'ordre général.