Université de Paris 1 - Année universitaire 2009-2010

Séance 5:

Quels "pères" de l'Europe ?

 

 

 

 

 

 

 

Le rôle des « Pères de l’Europe » a été souvent survalorisé par les témoignages et l’historiographie, au point de faire oublier qu’ils n’étaient pas seuls et que l’action européenne n’a pas représenté la seule facette de leur activité foisonnante.


Un colloque permet de revenir sur la notion de “pères de l’Europe”, définie ici au sens restreint d’un petit groupe de sept personnalités qui ont joué un rôle majeur dans le lancement de la CECA et de la CEE.
=> SMETS Paul F. (dir.), Les Pères de l’Europe : cinquante ans après. Perspectives sur l’engagement européen, Bruxelles, Bruylant, 2001, 236 p. On remarquera en particulier l’article introductif de Robert Frank, « Les pères de l’Europe : une difficile typologie », qui établit leurs points communs et dresse une typologie.

On y trouvera également une série d’études sur :

Voir également SCHIRMANN Sylvain (dir.), Robert Schuman et les Pères de l'Europe, Cultures politiques et années de formation, Actes du colloque de Metz du 10 au 12 octobre 2007 organisé par la Maison de Robert Schuman et le Réseau des Maisons des Pères de l'Europe, Bruxelles, PIE-Peter Lang, 2008, 361 p.

 


La liste canonique des sept « pères » de l’Europe

 

France :
Jean Monnet (1888-1979)
Robert Schuman (1886-1963)

Allemagne
Konrad Adenauer (1876-1963)

Italie
Alcide de Gasperi (1881-1954)

Belgique :
Paul-Henri Spaak (1899-1972)

Pays-Bas :
Johan Willem Beyen (1897-1976)

Luxembourg :
Joseph Bech (1887-1975)

I. Comment devient-on un « père de l’Europe » ?

A. Les héritages

- La spiritualité chrétienne => Robert Schuman « L’Europe est une communauté spirituelle et culturelle » (1953)
- Une formation intellectuelle juridique
- Des hommes des « frontières »

 

B. Les expériences vécues

Pas d’homogénéité générationnelle, mais des références communes, c'est-à-dire:


- Le traumatisme de la première guerre mondiale
- La Seconde Guerre mondiale et l’expérience commune de la défaite
- La peur de l’expansionnisme soviétique



C. Un engagement européen souvent tardif

Une forte expérience internationale

Des engagements antérieurs

Une conversion à l’idée européenne plus ou moins tardive

 

II. En quoi sont-ils des « Pères de l’Europe »?

A. Un compromis entre idéalisme et réalisme

- Les déceptions récentes qu'ils ont expérimentés (OECE, attitude de la Grande-Bretagne)

- Transcender débat entre unionistes et fédéralistes

Jean Monnet et Plan Schuman:
- Démarche fonctionnaliste
- Sectorielle (Charbon+Acier)
- Supranationale (Haute Autorité)

« En bref, d'un côté, ils écartent toute pensée figée qui n'a pas de prise sur réalité ; de l'autre, ils refusent le pragmatisme à l'anglaise, c'est-à-dire un réalisme qui s’enferme dans le réel pour ne pas le changer » (Robert Frank).

B. Une même vision de la construction européenne?

Ne sont pas des doctrinaires

-De Gasperi
«  Grâce à l’armée, l’Europe peut surgir (6 décembre 1951) »
Article 38 du traité CED ? Communauté politique européenne

- Adenauer : Equilibre des puissances européennes + Progresser vers l’unité européenne mais avec le temps

C. Un essai de typologie (selon Robert Frank)

III. Les « pères » de l’Europe, une notion à reconstruire?

A. Une construction téléologique

- Risque de faire une histoire «hagiographique» => minoration des échec comme celui de la CED.
- Risque d’exclure tout ce qui précède le 9 mai 1950 =>Poids des expériences antérieures…
- « Pères de l’Europe » construits sur le modèle de la construction nationale => un héros par pays…

B. Des hommes d’Etat surtout soucieux des intérêts nationaux?

Historiographie anglo-saxonne : Alan Milward - The European Rescue of the Nation-State (1992) : «The lives and teaching of the European Saints »

- Importance des intérêts nationaux:

Schuman : intégration européenne =

Gasperi : intégration européenne, seul moyen de relever l’Italie.

Bech : initialement contre le caractère supranational de la CECA, contre le Marché commun

C. Les limites de la « méthode Monnet »

- Le poids des circonstances

- Faiblesse de la recherche du soutien de l’opinion publique (construction d’une Europe technocratique)

- Culture délaissée et sous-représentation des intellectuels

Conclusion: d’autres « pères » de l’unité européenne?

Guy Mollet/Christian Pineau/Maurice Faure: traités CEE
Jacques Delors : Acte unique européen
François Mitterrand/Helmut Kohl : traité de Maastricht
Etc.